Date de publication : 07 juillet 2018
Idéal quand tout va bien
Coût raisonnable, choix pléthorique, ergonomie des sites, souplesse et rapidité des transactions, les nouveaux sites de location saisonnière entre particuliers séduisent les vacanciers. Mais si l’expérience tourne mal, on peut trop rarement compter sur eux.
« Une croissance insolente. » C’est ainsi que le cabinet d’études économiques Xerfi qualifie l’évolution du marché de la location saisonnière entre particuliers, dans une étude parue en août dernier. Pour des vacances en famille ou entre amis, les Français ont toujours affectionné ce type d’hébergement. Mais ces dernières années, le marché a connu une véritable explosion avec l’implantation d’Airbnb sur le marché français et la fusion d’Abritel et Homelidays, successivement rachetés par HomeAway, lui-même désormais sous la coupe d’Expedia. Cette entrée en scène de géants du tourisme s’est accompagnée d’une croissance impressionnante. Avec 76 millions de nuitées en 2016, le marché était en progression de 30 % par rapport à 2015 et la tendance devrait se confirmer.
Une formule qui séduit pour ses nombreux atouts par rapport à l’hôtel
Un succès qui s’explique par les nombreux avantages offerts par ce mode d’hébergement. Avantage économique d’abord. Une maison pour une grande tribu coûte nettement moins cher que plusieurs chambres d’hôtels. Même pour un week-end en amoureux, l’option – désormais largement disponible en ville, ce qui n’était pas le cas avant l’arrivée d’Airbnb sur le marché – se révèle souvent intéressante (voir l’encadré prix). D’autant que le choix de l’hôtel implique que l’on paye en plus les repas au restaurant. Autre intérêt des locations, la convivialité, avec des espaces communs pour toute la famille qui peuvent être assez vastes et que n’offrent pas hôtel ou camping. Enfin, le lien qui s’établit parfois entre hôtes et locataires est apprécié. « L’accueil est toujours personnalisé. Nos hôtes semblent heureux de nous recevoir, nous donnent des informations sur la région, sont prêts à répondre à toutes nos questions », se réjouit Caroline D. Propriétaire, David R. lui fait écho : « Louer nous permet de rencontrer des personnes de pays et de cultures divers. Nous adorons ces rencontres avec des gens qui apprécient l’échange. Nous nous efforçons de faire en sorte qu’ils se sentent comme chez eux. » Bons plans, visites inédites, restaurants à découvrir : certains hôtes ne sont pas avares de conseils utiles.
Il reste que les problèmes de tous ordres ne sont pas si rares. Selon notre étude 62 % des loueurs et un locataire sur cinq ont eu à y faire face. Ménage et rangement approximatifs, détériorations diverses, bruit gênant pour les voisins, les griefs exprimés par les propriétaires tournent autour du manque de civilité. Les locataires, eux, déplorent avant tout l’imprécision, voire la malhonnêteté des annonces. Logement non conforme à la description, saleté, équipements manquants, étage élevé non signalé ou encore bruit incommodant : autant de motifs de déception qui, sans donner forcément lieu à réclamation, peuvent sérieusement nuire à l’agrément du séjour.
Bienveillance excessive de beaucoup d’avis
D’où l’importance des avis pour éclairer son choix : ils sont le nerf de ces sites basés sur la confiance. Plus de huit locataires sur dix interrogés en tiennent compte, et les moins de 40 ans, plus familiers du commerce en ligne, s’y fient même à 98 %. Or, il faut être un habitué de ces sites pour savoir les décrypter. D’abord parce que la relation chaleureuse souvent nouée entre hôtes et locataires incite ces derniers à une bienveillance excessive. Ils l’avouent d’ailleurs sans retenue au détour d’une réponse. Un exemple : « Le logement, situé dans une montagne corse, était très mal isolé et présenté comme un chalet, alors que c’était une cabane de jardin améliorée. Mais après avoir vu le propriétaire et ses bons côtés, il nous a paru difficile de déposer un avis négatif. » Ou encore : « Malgré la VMC en panne avec reflux de mauvaises odeurs, la saleté, l’absence de Wi-Fi, j’ai mis un commentaire sympa, car l’appartement était bien rénové et pas cher. » Une retenue mal placée qui nuit finalement aux locataires suivants. « 80 avis et personne pour dire que la nationale est à 100 mètres et fait un boucan d’enfer ! », se plaint Stéphanie R. « Les commentaires, c’est le règne de l’euphémisme, confirme Delphine N. Quand vous voyez : “petit bémol”, suivi d’une réserve quelconque, vous pouvez être sûr qu’il s’agit en fait d’un problème majeur. » Bref, il faut savoir lire entre les lignes pour décrypter ce qui se cache derrière les 5 étoiles. Les sites sont d’ailleurs bien conscients de cette indulgence des voyageurs : Abritel/Homelidays considère que la note de 4 étoiles sur 5 est un minimum à atteindre, faute de quoi le propriétaire reçoit plusieurs avertissements et peut même voir son annonce suspendue.
Mais il y a pire. Selon plusieurs témoignages, les sites suppriment parfois les avis négatifs. « En août dernier, j’ai posté un avis sur une villa louée via Abritel en signalant que la propriétaire avait tardé à me rendre la caution pour des prétextes fallacieux. Dans un premier temps, l’avis a été publié mais l’hôte était furieuse et j’ai constaté, en octobre, qu’il avait été retiré », témoigne Éric P. « J’ai posté sur Airbnb un avis mesuré mais signalant deux problèmes majeurs dont l’absence de la connexion Wi-Fi promise, raconte Isabelle C. La propriétaire a répondu en me critiquant vertement. Or, je loue moi-même une chambre et son commentaire est apparu sur ma page “hôte”. Après d’interminables démarches auprès d’Airbnb, on m’a informé que “à titre exceptionnel”, on allait retirer le commentaire que je contestais. Or je me suis aperçue ensuite que mon propre avis sur le logement avait aussi été retiré. » Tout porte à croire que les sites, plutôt que de chercher à savoir qui a raison, préfèrent cacher la poussière sous le tapis.
Litiges : courage fuyons !
De même, ils sont trop souvent aux abonnés absents en cas de litige. Même s’ils ne représentent qu’un faible pourcentage des transactions, ces conflits peuvent transformer les vacances en cauchemar. Alors que les « frais de service » payés par les locataires sont supposés donner droit à une assistance 24 h/24, celle-ci s’avère parfois défaillante. Deux cas de figure reviennent dans les témoignages : le logement tellement éloigné de la description qu’il est impossible d’y rester (insalubrité, accès handicapé impossible, équipement indispensable absent) et l’annulation en dernière minute par le propriétaire. Dans les deux cas, les plateformes ne fournissent bien souvent aucune assistance digne de ce nom. Exemple, Olivier C. qui avait loué sur l’île de Lanzarote (Espagne) pour cinq personnes à Noël dernier avant d’acheter ses billets d’avion et a reçu une annulation deux jours avant le départ. Faute de véritable alternative proposée par Airbnb, il a dû se rabattre, après des heures de recherches stressantes (c’est la haute saison pour l’archipel), sur un logement plus cher de 1 200 €. Et il attend toujours l’indemnisation de la plateforme…
Tout repose sur la confiance
Finalement, ces sites ne font que refléter les nouvelles habitudes de consommation. Leur ergonomie est performante, la souplesse au rendez-vous (bien souvent on s’abstient d’état des lieux d’entrée et de sortie), la réactivité un maître mot, le paiement simplissime et la confiance au centre de la relation. Qu’elle soit trahie et tout s’écroule. D’où la réaction de certains lecteurs qui préfèrent procéder à l’ancienne avec contacts téléphoniques répétés en amont, contrat et état des lieux en bonne et due forme, paiement par chèque à l’arrivée dans les lieux et pas avant. Ils opteront plus volontiers pour des sites au positionnement plus classique tels que ceux de Gîtes de France, PAP Vacances ou CléVacances. Mais à eux trois, ils offrent trois fois moins de choix que Airbnb. C’est le paradoxe de plateformes qui surfent sur l’économie collaborative, ouverte à tous, et tendent aujourd’hui à monopoliser le marché à leur seul profit.
Le match des prix
En France, il n’y a pas photo !
Prix moyen en euros d’une nuit d’hôtel et d’un logement Airbnb toutes tailles confondues.
France |
Hôtel |
Airbnb |
|
Etranger |
Hôtel |
Airbnb |
Paris |
129 € |
91 € |
Londres |
165 € |
137 € |
|
Lyon |
127 € |
65 € |
Amsterdam |
135 € |
151 € |
|
Nice |
91 € |
75 € |
Barcelone |
110 € |
124 € |
|
Bordeaux |
90 € |
70 € |
Lisbonne |
91 € |
73 € |
|
Montpellier |
88 € |
52 € |
Rome |
98 € |
91 € |
|
Marseille |
86 € |
59 € |
Source : HRS et AIRDNA |
|||
Lille |
100 € |
62 € |
Airbnb
450 000 annonces en France
4,5 millions dans le monde (1).
Coût propriétaire : Mise en ligne gratuite. Commission de 3 %.
Coût locataire : Commission jusqu’à 20 %, dégressive selon le montant du loyer + frais de ménage éventuels.
Les clauses qui nous déplaisent :
Service clients 01 84 88 40 00 ou via la messagerie de votre compte.
Abritel et Homelidays (2)
200 000 annonces en France
2 millions dans le monde (1).
Coût propriétaire : Abonnement de 249 € par an ou bien 8 % de commission à chaque réservation. Dans les deux cas, frais de 3 % par paiement.
Coût locataire : Commission de 6 à 12 % selon la demande, la période de réservation etc. + frais de ménage éventuels.
Les clauses qui nous déplaisent
Contact 04 13 68 02 88 et via le formulaire de contact depuis la page d’aide (en cas de litige, faites des captures d’écran).
Notes
Notre étude en ligne Airbnb, votre favori En mars dernier, notre questionnaire sur la location entre particuliers a recueilli 2 399 réponses. Airbnb arrive largement en tête des sites utilisés, suivi par Abritel/Homelidays puis Gîtes de France. Sur tous ces sites, les locataires apprécient avant tout les prix inférieurs à ceux de l’hôtellerie, le choix, la présence d’avis, l’adaptation des logements à leurs besoins, tandis que les propriétaires citent la visibilité, la simplicité et la sécurité du paiement. Côté locataires, la plateforme préférée est Airbnb, suivie de peu par Gîtes de France, même si les sondés reprochent au premier les frais excessifs (frais de service, ménage). Ils recommanderaient moins Abritel et Homelidays (à 72 % contre 83 % pour Airbnb et 80 % pour Gîtes de France). Côté propriétaires, le fossé se creuse avec 88 % de satisfaction pour Airbnb et moins de 60 % pour Abritel et Homelidays (il n’y a pas assez de réponses pour Gîtes de France). Les différences d’appréciation portent essentiellement sur le nombre de locations réalisées, bien plus satisfaisant sur Airbnb, et surtout sur la politique de paiement. Abritel/Homelidays souffre d’une modification de sa façon de procéder en la matière : la généralisation de la réservation et du paiement en ligne est mal vécue par beaucoup de propriétaires, qui y voient un moyen pour le site de s’octroyer une commission supplémentaire et de faire fructifier les loyers, reversés tardivement. F. M. avec Marine Perier-Dulhoste Observatoire de la consommation de l’UFC-Que Choisir |
À retenir Locataires
Propriétaires et locataires
|
Que Choisir