L’exigibilité anticipée d’un prêt : ce que tout emprunteur doit savoir

Date de publication : 14 août 2025

L'exigibilité anticipée, également appelée déchéance du terme, est un mécanisme qui permet à la banque d'exiger le remboursement immédiat et intégral d'un prêt avant son échéance normale. Cette procédure exceptionnelle, encadrée par la loi, peut avoir des conséquences financières lourdes pour l'emprunteur. Il est donc essentiel de comprendre dans quels cas elle peut être mise en œuvre, comment s'en prémunir et quels sont les recours possibles.

Dans quels cas la banque peut-elle invoquer l'exigibilité anticipée ?

Le Code de la consommation et le Code civil prévoient plusieurs situations où la banque peut légitimement invoquer la déchéance du terme :

  • en cas de fausses déclarations (ex : faux relevés bancaires) ou de dissimulation d’informations, à condition qu'elles aient été déterminantes dans l'octroi du prêt,

  • à la suite d’un défaut de paiement : le non-paiement de deux échéances consécutives ou d'une échéance depuis plus de deux mois constitue un motif légal d'exigibilité anticipée. Toutefois, cette règle ne s'applique que si le montant des sommes dues dépasse un vingtième du montant total du crédit,

  • suite à une détérioration des garanties : si l'emprunteur compromet les garanties qui ont été constituées au profit de la banque (par exemple, en vendant un bien hypothéqué sans autorisation), 

  • en cas d’utilisation détournée des fonds (par exemple, dans le cadre d’un crédit affecté) ou de surendettement avéré,

  • suite au décès de l’emprunteur ou en cas de vente du bien financé, 

  • dans d'autres cas, s'ils sont prévus par le contrat. Ces clauses doivent, cependant, respecter certaines limites pour être valables : elles ne peuvent pas être abusives ou créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, elles doivent être suffisamment précises et ne pas laisser une marge d'appréciation trop large à la banque.

 

Avant d'engager une action judiciaire, il est souhaitable de négocier directement avec la banque en demandant un étalement du remboursement ou une remise partielle des pénalités.

La banque peut-elle réclamer une indemnité supplémentaire ?

En cas de déchéance du terme, la banque peut parfois réclamer :

  • le capital restant dû immédiatement ,

  • les intérêts échus impayés ,

  • une indemnité forfaitaire prévue au contrat (souvent appelée "indemnité de déchéance du terme").

Cependant, cette indemnité n’est possible que si elle est expressément prévue dans le contrat. De plus, elle doit être proportionnée, sous peine d’être jugée abusive (elle ne peut par exemple pas dépasser 8% du capital restant dû pour les crédits à la consommation).

Les juridictions peuvent la réduire ou l’écarter si elle porte atteinte à l’équilibre contractuel.

En outre, l'emprunteur peut être exonéré de l'indemnité forfaitaire :

  • en cas de décès, d'invalidité ou de chômage involontaire, 
  • si le remboursement anticipé résulte de la vente du bien financé suite à un changement du lieu d'activité professionnelle. 

Quelles sont les conditions de forme que la banque doit respecter ?

Pour que l’exigibilité anticipée soit valable, plusieurs conditions doivent être réunies :

  • l’existence d’une clause contractuelle claire et précise stipulant la possibilité de déchéance du terme. Cette clause est obligatoire,

  • un manquement suffisamment grave de l’emprunteur, comme indiqué précédemment,

  • une mise en demeure préalable, par courrier recommandé avec accusé de réception, qui rappelle l’incident, laisse à l’emprunteur un délai pour régulariser la situation et informe de la possible exigibilité anticipée,

  • un délai raisonnable laissé à l’emprunteur pour se mettre en conformité avant toute action en justice.

À défaut de respecter ces conditions, la banque ne peut légalement exiger le remboursement immédiat du prêt.

Que se passe-t-il si les conditions ne sont pas respectées ?

Si la banque ne respecte pas la procédure (par exemple, absence de mise en demeure ou clause absente du contrat), la déchéance du terme peut être jugée abusive ou inopposable à l’emprunteur.

Une procédure d'exigibilité anticipée abusive peut entraîner diverses sanctions pour l'établissement prêteur :

  • l'obligation de dommages et intérêts au profit de l'emprunteur, 
  • la déchéance du droit aux intérêts dans certains cas,
  • la nullité des clauses contractuelles abusives. 

La banque pourra toutefois engager une procédure de recouvrement classique pour les sommes échues, mais sans pouvoir accélérer l’ensemble de la dette.

Comment contester une exigibilité anticipée ?

De son côté, l’emprunteur peut contester la déchéance du terme. Plusieurs arguments peuvent être évoqués pour contester l'exigibilité anticipée :

  • le non-respect, par la banque, des conditions légales ou contractuelles, 

  • le caractère abusif des clauses contractuelles invoquées, 

  • la disproportion entre le manquement reproché et les conséquences, 

  • l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant les difficultés de paiement.

Pour faire valoir ses droits, l’emprunteur peut saisir le juge des contentieux de la protection, si la banque engage une procédure judiciaire. Il est également possible de saisir un médiateur bancaire en cas de litige. Enfin, en cas de difficultés financières, l’emprunteur peut saisir la commission de surendettement pour obtenir un rééchelonnement de la dette ou une suspension des poursuites.

Conclusion

L'exigibilité anticipée est un droit pour la banque, mais elle doit être mise en œuvre dans le respect strict des règles légales et contractuelles. C’est une mesure sérieuse qui peut avoir des conséquences financières importantes pour les emprunteurs. 

Ceux ci disposent de nombreux moyens pour contester une procédure abusive et obtenir réparation. La clé réside dans la prévention : une bonne compréhension du contrat, le respect des échéances et une communication transparente avec la banque permettent d'éviter la plupart des situations conflictuelles. En cas de difficultés, il ne faut jamais hésiter à solliciter l'aide d'un professionnel ou d'une association de consommateurs pour faire valoir ses droits.

Secteur
Auteur
JCL
Source
Capital, contrats d'assurances
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